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                           Compte rendu de séminaire 

 

Séminaire mobilités, échanges, circulations, «  Les migrants dans la ville ». 

 

Les mobilités à Trévise au XVe siècle. 

 

Trévise bénéficiait d’une bonne position géographique, en effet la ville était située à une vingtaine de kilomètres de Venise. Venise était une grande métropole, c'était une des villes les plus peuplées d’Occident et elle commençait à bâtir un empire sur la « Terre Ferme ». Trévise était le premier territoire de terre ferme conquis par Venise. La ville de Trévise était appelée « le petit jardin de Venise ». En raison de sa position géographique, la ville était en contact avec plusieurs territoires comme les Balkans ou encore le territoire Germanique. Trévise avait aussi pour avantage d’être traversée par plusieurs cours d’eau ce qui constituait un avantage pour les activités, la ville pouvait donc compter sur des voies fluviales et des voies terrestres, tous ces éléments constituent une position géographique favorable par rapport à Venise. 

La ville de Trévise a mis en place une imposition directe début 1434, Venise demandait aux territoires une somme d’argent pour financer ses guerres et les dirigeants de la ville ont décidé de faire des recensements fiscaux de la population sur la base de déclarations fiscales. A partir de 1434, 9 opérations fiscales ont été faites jusqu’à la fin du siècle,  une seule a été arrêtée en raison de la peste, celle commencée en 1455. Les déclarations étaient vérifiées. Avec l’exemple de la déclaration de Zuan Antonio,  un tisserand, on voit que les déclarants inscrivaient la date, leur nom ainsi que leur lieu d’habitation, dans sa déclaration Zuan Antonio décrit son atelier et ses outils en mauvaise qualité, il précise qu’il vit avec son oncle et donne également le montant de son loyer. Claude Gauvard les appellent « les mal-connus de l’histoire ». Plus de 7 000 déclarations ont été conservées, elles étaient examinées par trois commissions de trois membres chacune. Les familles les plus importantes ont conservé leurs déclarations notamment pour des questions d’héritage. Les sources fiscales permettent de retracer la biographie de certaines familles puisqu’elles permettent de retrouver des membres d’une même famille dans la durée. Les comparaisons avec les sources d’autres aires géographiques montrent la précocité des archives italiennes qui permettent de façon précoce dans le temps d’opérer des suivis des populations.

Dans les registres fiscaux, l’origine avait un sens, elle était très importante dans l’organisation du travail, des déclarations précises de la famille devaient être faites de même que les personnes qui travaillaient pour la famille devaient être déclarés notamment les serviteurs qui étaient essentiellement allemands. Les serviteurs travaillaient chez des personnes ayant la même origine qu’eux par exemple des allemands employaient des allemands.  Dans les registres fiscaux, 50% de la population n’indiquait pas de provenance. U. Istrael note qu'il n'y avait pas de mot précis pour les étrangers, l’indication géographique suffisait pour l’indiquer, la résidence comptait plus que l’origine. L’exemple d’une déclaration d’un porteur de sac montre qu’il mettait en avant leur pauvreté en précisant qu’il travaillait tous les jours, il évoque également une marée d’argent qui part à l’étranger, il dénonce ceux qui viennent travailler à Trévise un certain temps sans payer d’impôt. Le mot « Foreste » désignait ceux qui détenaient des biens dans la ville sans y résider. Le bon « migrant » était celui qui s'installait  dans la ville et y payait des impôts et a contrario le mauvais «  migrant » était celui qui ne payait pas d’impôt et profitait des opportunités économiques offertes par la ville. 

En ce qui concerne les auberges, dans les déclarations, il apparaît que certains déclarent des lits pour les étrangers par exemple 100 lits sont présents pour les étrangers de courtes durées. Les étrangers viennent tous les ans de l’extérieur. A partir de 1470, on trouve des traces des descendants des colporteurs qui venaient des vallées du Bergamasque, l’installation des colporteurs s’est faite par étapes.  Les colporteurs avaient beaucoup de dettes avec leur ville d’origine. Les habitants avaient des réticences face à certains étrangers. Giampaolo Cagnin a regardé entre 1286 et 1378, les privilèges accordés et 17 privilèges de citoyenneté ont été accordés aux Toscans et ceux qui ont obtenu les privilèges aux 13ème et 14ème siècles sont restés et font partie des acteurs majeurs politiquement aux siècles suivants. La population urbaine se renouvelle grâce aux migrations, lorsque l’on regarde vers la descendance le but était de ne plus travailler encore plus si on faisait un travail manuel car le travail manuel était mal vu. Si l’on s’intéresse aux merciers, on voit que les trois plus importants merciers en 1434 n’étaient pas originaires de Trévise et la plus importante était tenue par une femme. Les trois familles qui dominaient ne sont plus merciers par la suite, il y a un renouvellement par d’autres membres, l’un venu de Padoue. On s'installe dans les bourgs de la ville et si on réussit, on rentre dans le centre-ville.

Certaines  nationalités étaient plus présentes dans certains domaines comme les boulangers qui étaient majoritairement allemands, les archives montrent qu’ils avaient presque tous le même nom et qu’ils n’achetaient pas de biens mobiliers. Ils étaient également présents dans les auberges. Les bergamasques étaient dans le vin, ces spécialités se maintenaient au sein des mêmes nationalités. Parfois, les autorités ont mis en place des législations pour casser le monopole - : pour les porteurs de vin, les candidats devaient être approuvés par une commission dont les membres ne devaient pas être des bergamasques. En ce qui concerne les femmes, comme dans beaucoup de documentations anciennes, les femmes sont plus difficiles à suivre que les hommes. Les raisons de leur relative absence des sources peuvent s’expliquer par le fait que lorsque les femmes devenaient épouses,  le mari ne donnait pas leur nom, seulement 5% bénéficiaient d’un patronyme, ce qui rend  leurs suivis difficiles. 

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